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Le 6 juin 2020, par Philippe Juraver

Je reproduis ici, avec son accord, le très beau texte de mon ami et camarade Philippe Juraver avec qui je milite au sein de l’Espace des Luttes de la France Insoumise depuis bientôt trois ans.


Bonjour Tristesse.

On s’habitue à tout ou presque ! On s’habitue à ce que les gens qui nous croisent dans la rue changent de trottoir, juste parce qu’on est noir ou arabe. On s’habitue à la réflexion de celui qui crie à la « racaille » en spécifiant : ha oui mais toi c’est pas pareil, comme si on bénéficiait d’un privilège.

On s’habitue aux remarques racistes, aux petites phrases ambigües, aux blagues un peu limite, aux lieux commun du noir sportif qui danse bien parce-que‑c’est-dans-ses-gènes. La liste n’est pas exhaustive mais elle illustre tout ce racisme latent, ce racisme politiquement correct bien installé qui permet rapidement de passer à la vitesse supérieure vers un racisme plus conscientisé, plus revendiqué ‚plus violent. Et là on ne peut plus s’habituer. George Floyd et Adama Traore ont en commun d’être noirs et d’être victimes de violence policière raciste. Ils ont aussi en commun d’être des détonateurs symboles de la révolte légitime de communautés pauvres qui subissent au quotidien.

L’espace des Luttes de la France Insoumise est riche de ces minorités qui luttent contre les discriminations sociales, car c’est la misère, l’injustice sociale, la violence économique et policière qui conduisent à la colère et au rejet de la société et de certaines de ces règles. Ce n’est pas un hasard si les révoltes éclatent juste après la pandémie avec ces conséquences sociales et économiques, l’explosion du chômage et de la précarité. Ce n’est pas non plus un hasard si cette violence se déchaine aux États‐Unis, berceau du capitalisme et donc des inégalités.

C’est d’abord une histoire d’ignorance et de misère. Quand les Gilets jaunes se faisaient mutiler, c’était du racisme de classe et beaucoup de Français ont alors compris ce sentiment d’être méprisé, rejeté, montré du doigt, dénoncé comme voyou ou antisémite rejoignant dès lors ces minorités d’étrangers, d’émigrés, de Français qui ne sont plus autorisés à être citoyens à part entière. Ils sont souvent parqués dans les « territoires perdus de la République », comme disent les médias. Les territoires et leurs habitants ne sont pas perdus, ils sont abandonnés comme des parias, ils sont exclus et maltraités. L’esclavage moderne est ainsi institutionnalisé par la chaine invisible de la précarité, mais aujourd’hui le boulet de la chaine se transforme en bombe et la mutinerie s’organise.

Le déni et la terreur attisent les braises de cette révolte et les médias et le pouvoir tremblent à l’idée d’une contagion populaire. Quand Castaner proclame qu’il sanctionnera toutes les remarques racistes, même s’il sait qu’il n’en fera rien, il est en panique devant cette colère qui gronde, cette police en roue libre qu’il ne maitrise plus et sans laquelle la macronie serait à terre.

Les médias nient le racisme dans la police et ses violences lorsqu’ils refusent de voir et de dire que le gouvernement Macron, le plus violent de la Ve République, plonge la France dans l’autoritarisme, joue avec le spectre du RN et réveille les peurs et les haines d’une population française à bout de souffle.

Oui le racisme tue et pas seulement à petits feux ! Oui il gangrène notre police républicaine et ce n’est pas acceptable. Oui il existe une impunité policière, politique et une justice à la peine et à deux vitesses qui ne peut plus garantir notre sécurité.

Oui Camélia Jordana a raison et nous avons peur pour nous, pour nos enfants, parce que nous sommes noirs, arabes, turcs ou tout simplement pauvres!

La misère, le racisme, la violence ne sont pas des fatalités mais des politiques qui échappent à notre pouvoir citoyen.

La révolte gronde, les murs tremblent ? Il était temps !!!!

À mes ami(e)s,

Philippe JURAVER